Elle tombe bien, cette interview de Chico, en ce 5 juillet pluvieux, frais, en Alsace. Elle tombe bien, car elle va remettre un peu de soleil sur vos écrans d’ordinateurs, tablettes ou smartphones.
Cette interview, elle sent bon le sud de la France. Rien qu’à lire les propos de Chico, ce sont mille et un souvenirs qui vont remonter, mille et une notes, aussi, de ces guitares gypsies qui vont résonner.
Chico & The Gypsies seront parmi les têtes d’affiche du festival Summerlied à Ohlungen, juste à côté de Haguenau, du 17 au 19 août. L’occasion pour le chanteur et son groupe de présenter leur nouvel album d’adaptations de chansons pop/rock et variété à leur propre musique.
Chico, ce nouvel album de reprise, intitulé Mi Corazon, sort le 27 juillet. Que va-t’on y trouver ?
Des chansons actuelles. Il y aura une chanson de Vianney, une chanson de Stromae, ce sont vraiment des chansons qu’on écoute encore, des chansons d’aujourd’hui, revisitées dans l’immédiateté de notre façon de faire. Pour nous ça a été un véritable plaisir de les reprendre, car ce sont des chansons que nous écoutons régulièrement. Quelque part, ça nous intéressait de les reprendre et d’ajouter notre âme musicale à ces chansons.
Ce sont des chansons interprétées par le groupe, ou les interprètes originaux viennent apporter leur voix, comme Patrick Fiori l’avait fait sur votre version de My Way de Sinatra ?
Non, non, là ce sont les chanteurs du groupe qui ont repris les chansons. Avec toutes ces voix, ça donne une espèce de panel de voix extraordinaire !
Vous décidez comment du choix des chansons ?
En fait, chacun dit un peu ce qu’il aime et on fait une liste de chansons. Puis on essaye de recentrer le nombre de chansons qui nous intéressent, et on aboutit à la liste de l’album.
Sur le nouvel album, vous adaptez des chansons des autres. Mais avez-vous déjà imaginé des adaptations de vos chansons via l’électronique, le rock ou d’autres styles ?
Mmmm…. Non, ou peut-être qu’on n’a pas encore eu l’idée ou le flash pour le faire. Nous, ce qu’on aime c’est ce qu’on fait. Mais demain… demain je dis toujours que c’est un autre jour.
« Elle m’a aimé », reprise de Kendji Girac par Chico & Les Gypsies, extrait de leur nouvel album, Mi Corazon
Et parmi les premières scènes où vous interpréterez ces nouvelles chansons, il y a Summerlied, en Alsace. Ce festival, son esprit, son affiche, ça vous parle plus particulièrement ?
Oui, je crois qu’apporter notre touche gipsy, ça va donner une dimension nouvelle, et puis vous allez voir, c’est deux heures de spectacle, avec des solo de guitare… On emmène le public vers un voyage d’émotions assez extraordinaire.
La musique manouche a ceci de particulier qu’elle est à la fois joyeuse et triste…
Oui, c’est un peu comme le blues. Quand on l’écoute de manière calme c’est du blues, et quand on lui met du rythme, ça devient du rock’n’roll. Moi j’adore ça. C’est dans ces musiques gipsy et flamenca qu’il peut y avoir la tragédie ou la fête. Et tout dépend de l’intensité que l’on met dans les rythmes.
Je me suis aperçu de quelques paradoxes vous concernant. Vous allez me dire si j’ai raison, ou complètement tort…
1° L’Alsace est une grande région de la musique manouche, de la musique tzigane et pourtant vous vous y produisez très rarement…
Oui, alors la musique manouche c’est une approche très différente, une autre partie de la mosaïque de ce peuple gitan. Je dirais plus qu’on fait du gipsy catalan que du manouche, mais ça fait partie de cette même grande famille.
Ensuite, oui, c’est vrai qu’on vient rarement en Alsace, mais du coup chaque fois ça fait l’événement et j’en suis ravi !
Quelle est la différence entre le gipsy catalan et la musique manouche ?
Je dirais que le gipsy catalan c’est plus avec influence espagnole (rumba, flamenco), nous on appelle notre musique le gipsy rock. Et dans le manouche c’est plus l’influence de Django Rinehardt par exemple. C’est plus du jazz manouche. C’est un cousinage, mais en même temps le plus important c’est que la musique existe !
2° Autre paradoxe me semble-t-il, vous êtes des stars françaises partout dans le monde, mais parfois en France certains vous moquent, trouvent un côté un peu kitsch à votre musique…
Franchement, on ne le ressent pas (rires). Mais ceux qui pensent ça, je les invite à venir au concert ! Parce que je pense que si on a du succès dans le monde entier c’est qu’il y a une vraie qualité, une vraie passion, une vraie émotion que nous transportons. Et vous savez, nos prochains voyages vont nous emmener à Shanghai, Tokyo, une tournée en Allemagne, etc.
Donc, il faut que ces gens viennent me voir sur scène !
Vous vous considérez plutôt comme des musiciens/compositeurs/ interprètes ou comme des passeurs d’émotion et de tradition ?
Je dirais les deux, parce que c’est tellement lié.
Avez-vous un souvenir très particulier d’un concert ?
Dans les concerts, y’aurait beaucoup à dire. Mais le moment le plus intense que j’ai vécu jusqu’à présent c’est d’avoir eu la chance de jouer dans les années 70 pour Charlie Chaplin. Et vous savez, lui qui avait fait rire le monde entier, notre musique l’a fait pleurer. Et pour moi c’était un des signes qui montraient que notre musique allait avoir un grand avenir.
Et Chaplin était comme vous : à la fois dans le rire et la tragédie…
Eh oui, Chaplin était à fond dans la tragédie. C’était un acteur tragicomique. Il y avait une telle vérité dans ce qu’il nous montrait.
La musique gipsy c’est pareil, c’est l’émotion à l’état pur. Vous savez, on ne connait pas la musique. On joue avec tous les sentiments qui nous entourent. C’est la spontanéité à l’état pur. C’est elle qui donne cette aura à la musique.
Teaser du nouveau spectacle de Chico & Les Gypsies
Y’a-t-il parfois des morceaux que vous avez un peu marre de jouer ?
Non, pas du tout. Si le public nous réclame un morceau c’est parce quelque part c’est un bel hommage à ce qu’on a fait et qu’ils ont aimé, et nous aussi. Donc, non, on ne dit jamais non au public. Ca fait 30 ans qu’on chante Bamboleo parce que notre public l’aime et nous aussi, c’est notre porte-bonheur. Elle est presque comme au premier jour, alors qu’on a fêté les 30 ans de ce succès. C’est un sentiment de plaisir intemporel. Nous avons la chance de proposer une musique qui n’a pas de barrière d’âge, pas de barrière de langue, pas de barrière sociale. C’est vraiment une passerelle entre les émotions des uns et des autres, et je suis ravi d’y participer.
La musique gipsy est ancrée dans une tradition du partage, du voyage, du monde-village…. Est-ce que les réseaux sociaux n’ont pas été « inventés » d’une certaine façon par la communauté gitane ?
Ah c’est que ça ! Ca me fait plaisir que vous le disiez (rires).
C’est vrai que quelque part il y a une transmission orale qui s’est tout le temps fait dans le monde gitan. Et aujourd’hui avec les réseaux sociaux ont est tous reliés à la seconde. C’est la fois bien et pas bien, puisque la rapidité prend le dessus sur tout, mais parfois ça va tellement vite qu’on en oublie d’apprécier les bons petits moments.
Chico & les Gypsies, nouvel album « Mi Corazon » disponible le 27 juillet 2018
En concert à Summerlied (Ohlungen) le dimanche 19 août à 20h30
www.summerlied.org