« Everybody needs a short story, everybody needs a tale to tell… » Une courte histoire, un conte à raconter, c’est le propos de ce premier album d’Ill River, groupe formé par le duo Cary T Brown et Aurélien Boilleau et leurs –alors- musiciens accompagnants. Mais le rock n’est pas une rivière tranquille et une grosse crue aura eu raison de l’amitié du duo.
Cary T. Brown, désormais principal vocalise, accompagné par un groupe ne quitte pas totalement cet urban folk qui avait fait le succès de son duo précédent. Mais en l’électrisant et l’enveloppant de nappes de clavier organique et parfois même orgasmique, il revient à un rock qu’il pratiquait voilà … quelques années, au sein du combo April Skies. Retour aussi à des sources musicales allant des Kinks à la scène indie du début des années 90 (Grant Lee Buffalo, Todd the Wet Sproket, Hootie & the Blowfish, the Posies…)
Cary T. Brown est chanteur. Certes. Mais surtout, le garçon est un conteur, un passeur d’histoires et d’émotions. Sous son stetson (désormais rangé, précisons-le !), on l’imagine autant tenir la guitare sur une scène et proposer son rock bravache, qu’assis sur un rocking chair, contemplant son Kentucky natal, sa musique baignant un épisode de l’excellente série TV Justified.
Et si l’on parle des cowboys, les espions ne sont pas loin non plus dans « Sometimes », où 4 notes savamment distillées en arrière- plan nous rappellent un certain 007…
Ill River propose à travers les 10 chansons de A tale to tell un voyage dans une Amérique loin des clichés hollywoodiens, loin de la folie newyorkaise, mais à la fois plus universelle et en même temps au plus près du cœur de cet pays que sont finalement les Etats Unis. L’Ill River doit être cette rivière qui coule, malgré les crues, quelque part près de Strasburg, Ohio. Ou de Strasburg, Pennsylvanie. Ou de Strasbourg, Colorado. Ou de Strasburg, North Dakota. Ou de Strasbourg, Alsace…
https://www.youtube.com/watch?v=WYNLgQx1Uqw
Ill River première époque, en 2015
RENCONTRE AVEC CARY T. BROWN POUR PRÉSENTER CE NOUVEAU PROJET !
Ill River, c’est un retour à la logique de groupe, entamée au siècle dernier avec April Skies, aux Etats Unis…
Oooh, le dernier vrai groupe c’était avec Miguel Ruiz, en 2001. Ca s’appelait Cary T. Brown and the French Dude. Et sur mon album solo en 2006, ça devait être un groupe, mais pour des raisons économiques ça ne s’est pas fait. Et il faut fidéliser les musiciens autour du projet. Donc, ça ne s’était pas fait.
Mais là j’ai une équipe du tonnerre, les meilleurs musiciens que je connaisse, et ce n’est pas juste pour dire… Y’a Stéphane Bonacci à la guitare, y’a Manuel Boch aux claviers (Hammond et Rhodes), Aurél’King à la guitare acoustique et au chant. A la batterie, le fantastique Jérôme Spieldenner, et à la basse Jérôme Wolff qui est aussi une référence. Je ne sais pas comment cette équipe s’est formée autour du projet. Je suis trop heureux !
C’était difficile au début, à cause des changements artistiques vis-à-vis de l’ancien projet (Cary T. Brown &Aurélien Boilleau, NDR), mais, bah, on grandit, on change, on prend des virages artistiques. Y’a des gens qui quittent le projet et d’autres qui arrivent. C’est de la maturité…
Revenons à cette séparation, Aurélien Boilleau, ton compagnon de route pendant plusieurs années. Il était dans Ill River au début du projet, qui prenait la suite de votre duo, et il est parti. Que s’est-il passé ?
J’avais déjà un grand désir de développer un projet qui me ressemble plus. Un peu plus musclé, avec des poils et de l’assise, avec à la fois des moments de rage et de calme. Un peu plus de dynamique, en fait. Et une identité qui est la mienne.
Quand on parle de duo, on parle de dualité, de yin et de yang, et là j’avais envie de développer un projet qui me ressemble et me permet de développer plus mes racines. Là c’est sans compromis d’influences ! Mais attention, je puise aussi dans les influences des musiciens qui m’accompagnent. J’ai beaucoup laissé d’ailleurs en direction artistique à Stéphane Bonacci qui fait des arrangements fabuleux, lui il a une bonne partie. Mais c’est quelqu’un qui compose avec moi en tête. Il se concentre sur l’univers que je pose avec mes textes, la façon dont je chante, qui je suis. C’est ultra naturel, en fait. Je me sens aussi bien sur scène qu’en dehors de la scène. Plus besoin de faire semblant, c’est du pur authentique.
Qu’aurais-tu à dire aujourd’hui à Aurélien. On sait que pour lui le départ du groupe n’a pas été facile…
… Bon vent. Tout simplement.
… quand un album plait, on le balade à cheval, ou non…
Revenons à cet album, A tale to tell, quelle en est l’évolution ?
Y’a plein d’ambiances, de calme et de rage… Je suis outré par les petites choses… non, par les grands problèmes de la vie. Ca fait des années que je n’avais pas pris position ou déclaré ma colère, et c’est bien d’avoir cette liberté d’exprimer des choses. Sans avoir à considérer une autre personne dans l’expression de mon écriture. Je peux donc faire des choses un peu plus personnelles, sans dire que je suis le sujet. Mais j’ai une liberté d’écriture plus grande, sans avoir à m’interroger sur l’accord de la personne qui partage les paroles avec moi. C’est une personne qui porte la parole. Les autres sont des musiciens, et ils sont de plus en plus enthousiastes à l’idée de partager ces chansons.
Et il y a le retour des solos sur l’album !
Aaaah, la guitaaaare, ouais ! C’est génial, ouais ! Stéphane (Bonacci) est un excellent guitariste, et il a un phrasé qui rappellerait Jimmy Page, dont il est grand fan. Il plaque des solos qui ont un vocabulaire très intéressant, avec un bon grain et un bon son. On ne va pas s’en priver. Parce que ça existe encore des guitaristes qui savent chanter avec leur gratte, quoi !
Un mot sur les influences de cet album. Ca m’a rappelé pas mal de trucs des 90’s, comme Todd The Wet Sproket, Hootie & the Blowfish, Dinosaur Jr, qui venaient du rock indie, mais en puisant dans les autres musiques, comme la folk ou la country…
Ah ça fait super plaisir !! Hootie & the Blowfish, ils étaient de ma région, en plus !!! Purée, Todd the Wet Sproket, je ne savais même pas que c’était arrivé jusqu’en France !
Je m’aperçois que je suis quelqu’un avec beaucoup d’influences ! Je suis né dans le sud, mes grands parents habitaient à 40 minutes du Nashville Opera, la Mecque de la musique country. Du coup j’ai eu droits aux lives des plus grands. Là, déjà j’ai baigné dans la musique country, le bluegrass. Mais ma maman, elle, écoutait Fleetwood Mac, Elton John, Cat Stevens dans un Camaro 69 décapotable. Elle fumait des pétards avec ses copines. C’étaient les 70’s ! Avec mon frère, on baignait dans ces musiques !
C’est de là que te vient cette approche si mélodique de la musique ?
Je pense que la musique, on la fait pour les autres. Et donc, si on commence à faire quelque chose de très cérébral, et qu’on prive les gens de ce qu’on fait, il n’y a plus de partage. Je pense que des mélodies simples sont importantes. Moi je n’aime de toute façon pas les choses trop compliquées. Une jolie mélodie c’est bien. Mais si les textes veulent dire quelque chose. J’ai parfois des chansons qui commencent à une page complète de paroles et d’histoires. J’essors et je chope des idées. Il faut qu’il y ait un fond ! Et ensuite, on marie ça avec des mélodies simples. Je ne suis pas un grand technicien…
Et si je te dis que tu es plus conteur que chanteur, un peu comme Fish, le premier chanteur de Marillion ?
Ouaaaaiiiiis ! J’adore Fish !!!! Vigil in a Wilderness of Mirrors c’est un album fabuleux !!! Oui, effectivement, il raconte quelque chose ! Pink Floyd, Roger Waters il raconte des choses. Même si on peut imaginer que le chanteur raconte quelque chose par rapport à lui-même, en fait ce sont des idées super universelles. Et si on complique, on n’a plus ça. Qui n’aime pas fredonner, chanter une petite chanson dans sa voiture, ou pour ses enfants.
Un peu comme Springsteen…
Maiiiis… un génie, un pur génie (il commence à chantonner Glory Days).
Oui, juste avec les premières phrases de cette chanson, on a une histoire. C’est fantastique ! Ici, Cabrel est très fort pour ça. Brel, un peu moins. Mais Brassens, en quelques phrases il te racontait de super histoires !
Is your name Bond, Cary T. Bond ? la chanson Sometimes m’a inspiré cette question, avec quatre notes qui se baladent comme ça…
Ouais ! C’est assumé. C’est un clin d’œil assumé ! Et je ne dirais pas non, c’est sûr, si la chanson devait être au générique d’un prochain 007 (rires) !!!
Sur scène, des reprises, des chansons de ton ancien répertoire ?
Voyons … il y aura une chanson qui est dans mon répertoire depuis…. 1991, que les habitués connaissent, elle s’appelle Nothing, une excellente chanson écrite par un ami américain. Mais qui ne sera jamais sur un seul album.
Quant à une reprise… ce sera une surprise !
Et en français ?
Non, je ne me sens pas encore assez à l’aise. Si ça doit se faire un jour, ce sera un EP ou un album complet en français, mais je n’arrive pas encore à trouver en français les mêmes sensations qu’en anglais.
Dernière question, très pratique, où trouver l’album ?
Alors, en physique, ce sera à nos concerts, ou bien vous m’envoyez un e-mail ou un message sur facebook et on vous le fera en VPC. Aujourd’hui on n’a plus de label.
Pour le digital, on sera distribués sur deux plateformes.
La première c’est CDBaby.com mais il faut payer en dollar. Bon, ce n’est plus un problème. J’ai pris cette décision pour distribuer aux Etats Unis.
En France, ce sera x-plosemusic.com. C’est un distributeur indépendant collaboratif, participatif. En fait c’est un philanthrope et il a une vision sur la distribution de la musique où la redistribution est équitable et juste vis-à-vis de l’article et en plus en règle avec la SACEM.
Ill River, présentation de l’album A tale to tell
Vendredi 24 février 2017 à 20h30
Espace culturel de Vendenheim
Réservations et renseignements : 03 88 59 45 50